Modèles de soins en pratique sage-femme MMoC – la voie à suivre 

L’initiative Midwifery Accelerator : l’expansion des soins de santé pour les femmes est le résultat d’une collaboration mondiale entre les agences de santé des Nations Unies, l’ICM et d’autres partenaires clés. Il s’agit d’une « initiative mondiale unifiée et fondée sur des données probantes visant à améliorer de manière significative les résultats en matière de santé maternelle et néonatale en développant les modèles de soins des sages-femmes à l’échelle mondiale » (1). 

Lors du lancement du Midwifery Accelerator le 7 avril 2025 (2), SAR Sarah Zeid, princesse de Jordanie, a ouvert la session par un discours percutant et un appel à l’action. La princesse Sarah a décrit avec justesse les récents changements et événements politiques qui ont eu un impact négatif sur le financement humanitaire mondial. « Les perspectives pour les femmes et les filles du monde entier sont pires que jamais et nous sommes en crise. Le système multilatéral est en lambeaux. L’architecture humanitaire et de développement déjà inadéquate est en train de s’effondrer. Les lois internationales sont effrontément violées et la violence et les mensonges ne sont pas contrôlés ».  

La princesse Sarah a ensuite énoncé quatre faits irréfutables et percutants qui doivent être reconnus et mis en œuvre si nous voulons réduire la mortalité et la morbidité maternelles et néonatales et atteindre les objectifs de développement durable pour la santé et le bien-être (ODD 3) et l’égalité des genres (ODD 5) d’ici 2030. 

Elle a dit : 

• « La santé, le bien-être, l’éducation et la participation égale des femmes et des filles sur le lieu de travail et dans la société en général sont la clé de voûte de la paix et de la prospérité familiales, communautaires et nationales. » 
• « Peu importe le calme ou le chaos environnant, les gens ont des relations sexuelles, les femmes et les filles tombent enceintes et les bébés naissent. » 
• « La majorité des mortinaissances, des décès maternels et néonatals et des blessures sont évitables. C’est un fait. Nous savons ce qui doit être fait pour que chaque grossesse soit désirée, que chaque grossesse et chaque accouchement soient sains et soutenus et que chaque mère et chaque soignant dispose des informations et des ressources nécessaires pour donner à leurs enfants les éléments constitutifs d’une croissance cognitive, émotionnelle et physique optimale. » 
• « Si en tant que coalition mondiale de croyances et d’ambitions partagées, nous n’agissons pas avec urgence, courage et principe, si nous ne sommes pas disposés à centrer notre travail sur les besoins des autres et non sur nos idéologies, nos priorités et nos calendriers, si nous ne sommes pas prêts à utiliser systématiquement nos voix, notre accès et notre influence pour plaider et pour permettre aux sages-femmes, aux travailleurs de première ligne et aux services de reproduction ; les femmes, les filles et leurs nouveau-nés continueront de mourir en plus grand nombre. » 

Centrer notre travail sur les besoins en matière de santé sexuelle et reproductive (SSR) des femmes, des filles et des personnes de genres divers exige d’investir dans des systèmes innovants et durables et d’utiliser les ressources de manière optimale, en particulier dans les contextes humanitaires et fragiles où nous savons que la plupart des décès maternels et néonatals surviennent (3). 

Les sages-femmes éduquées et réglementées selon les normes mondiales et habilitées et soutenues à travailler dans tout leur champ de compétences ont le potentiel de fournir 90 % des services essentiels de santé sexuelle, reproductive, maternelle, néonatale et adolescente (SRMNIA) (4,5). La couverture universelle des interventions dispensées par les sages-femmes pourrait éviter 67 % des décès maternels, 64 % des décès néonatals et 65 % des mortinaissances, ce qui permettrait de sauver 43 millions de vies par an d’ici 2035 (5). Malgré des données probantes claires, les défis persistent. Pour répondre au besoin d’améliorer les résultats en matière de SRMNIA d’ici 2030, les estimations prépandémiques ont révélé la nécessité  de 900 000 sages-femmes supplémentaires (6). Les estimations post-pandémies placent les besoins à un niveau beaucoup plus élevé.     

Malgré les difficultés auxquelles sont confrontées les agences humanitaires et les organisations à but non lucratif, 2024 et début 2025 ont vu des progrès significatifs dans les efforts visant à renforcer la profession de sage-femme. 

L’initiative Midwifery Accelerator (1) s’appuie sur l’élan créé par le lancement de l’OMS de la Transition vers les modèles de soins de pratique sage-femme en octobre 2024 (4) et fait écho à l’appel à investir dans les modèles de soins de pratique sage-femme en tant qu’approche intelligente, rentable et fondée sur les droits de la personne pour améliorer les résultats en matière de santé à l’échelle mondiale.  

Modèles de soins de pratique sage-femme* (Midwifery Models of Care—MMoC) est un terme générique désignant la prestation de soins par des sages-femmes instruites, autorisées et réglementées qui coordonnent leur travail dans différents environnements et contextes. Les sages-femmes dispensent des soins primaires au sein de la communauté, dans les foyers de femmes et au niveau des soins secondaires et tertiaires. Les dénominateurs communs des modèles de soins de pratique sage-femme sont la coordination des soins fournis par des sages-femmes autonomes qui travaillent dans un environnement soutenu, intégré et collaboratif. Selon les principes directeurs du modèle de pratique sage-femme, les besoins et les préférences de la femme sont satisfaits d’une manière centrée sur la personne et respectueuse et sur un partenariat de confiance et réciproque avec la sage-femme.  

Les sages-femmes fournissent des soins de haute qualité tout au long de la vie sexuelle et reproductive ; contraception, soins d’avortement sans risque (avortement provoqué et lié à la perte de grossesse), soins prégrossesse, tout au long de la période postnatale, soins à la mère et au nouveau-né.  

Les soins de pratique sage-femme optimisent les processus physiologiques, biologiques, psychologiques, sociaux et culturels, en utilisant des interventions uniquement lorsque cela est indiqué. Toutes les femmes ont besoin de sages-femmes, et certaines ont aussi besoin de médecins et pour cette raison, les sages-femmes ne travaillent pas seules. Elles appartiennent à des réseaux de soins, travaillant dans des équipes interdisciplinaires pour la fourniture de SRMNIA, consultant et référent, lorsque les besoins des femmes deviennent complexes et qu’une intervention peut être nécessaire (4). 

Le Midwifery Accelerator fournit une base solide pour la mise en œuvre de modèles de soins de pratique sage-femme, offrant une feuille de route partagée et fondée sur des données probantes pour élargir l’accès à des soins de qualité, respectueux et centrés sur la personne. Il s’articule autour de trois piliers d’action, chacun représentant un domaine majeur pour la création d’un changement durable des services de maternité : 

• S’engager et investir 
• Éduquer, déployer et fidéliser 
• Plaider et autonomiser 

À travers ces trois piliers, le Midwifery Accelerator décrit sept priorités stratégiques (« accélérateurs »), donnant aux gouvernements et aux partenaires un ensemble clair d’actions de haut niveau pour aligner les efforts, amplifier l’impact et étendre la couverture de la pratique sage-femme et augmenter la capacité du système pour la réalisation des objectifs de couverture sanitaire universelle.  

L’Accelerator marque une étape importante dans la reconnaissance de la profession de sage-femme et des modèles de soins de pratique sage-femme comme essentiels à la réalisation des objectifs de santé et d’équité entre les genres. Il démontre clairement le lien essentiel entre les cadres politiques et réglementaires de haut niveau, les investissements nationaux et mondiaux, ainsi que l’éducation, le développement professionnel et le déploiement de pratique sage-femme de qualité. À l’échelle individuelle, il souligne l’importance de créer des lieux de travail sûrs, solidaires et responsables, où les sages-femmes peuvent obtenir satisfaction au travail et s’épanouir et, surtout, rester dans la profession. Il plaide également en faveur de l’établissement de parcours professionnels clairs, permettant aux sages-femmes d’assumer des rôles de leadership, de renforcer leur profession, de mener des efforts de plaidoyer et de faire progresser l’équité de genre pour les femmes, les filles et les sages-femmes elles-mêmes.  

Ensemble, la prise de position mondiale de l’OMS sur la transition vers des modèles de soins de pratique sage-femme (4) et le Midwifery Accelerator fournissent un élan substantiel et attendu depuis longtemps en reconnaissance de la profession de sage-femme et du droit des femmes à des soins respectueux. Beaucoup de travail reste à faire, mais il ne fait plus aucun doute que les sages-femmes sont un élément essentiel des investissements rentables et de haute qualité dans les efforts visant à améliorer les résultats en matière de santé maternelle et néonatale.  

Cet article est le premier d’une série de trois. Dans le prochain article, nous explorerons plus en détail les modèles de soins de pratique sage-femme (4) en examinant le guide de mise en œuvre qui les accompagne et qui devrait être lancé prochainement. Dans le troisième article, nous explorerons différentes formes de modèles de soins de pratique sage-femme et soulignerons la nécessité pour tous les pays de répondre à l’appel à l’action en mettant en œuvre des modèles innovants qui répondent aux difficultés pertinentes pour leur contexte, renforcent la profession de sage-femme et élargissent le choix pour les femmes.